Conformément aux consignes du Président de la République, la commission a rendu un rapport intermédiaire hier soir portant sur la réforme nécessaire de la distribution et du commerce et sur l'accès au logement. Elle y présente une série de propositions visant à accroître la concurrence pour augmenter le pouvoir d'achat et mettre la politique du territoire et du logement au service de la croissance. Outre des mesures réglementaires, fiscales et économiques, la commission propose sur le plan environnemental la construction avant 2012 de dix villes nouvelles écologiquement exemplaires. Dénommées Ecopolis, ces villes, d'au moins 50.000 habitants, intégreraient une haute qualité environnementale et les toutes nouvelles technologies de communication. Elles devraient servir à faire progresser massivement l'urbanisme général, au service d'objectifs de croissance durable tels que des infrastructures haut débit, des transports technologiquement à la pointe et des construction « durables ». Par ailleurs, ces « espaces urbains durables » devront intégrer emploi, logement, cadre de vie et mixité sociale et mettre en oeuvre des ressources énergétiques renouvelables comme les éoliennes et les panneaux solaires. La commission espère que ces Ecopolis joueront ainsi le rôle de laboratoires de la réduction de la consommation d'eau, du tri des déchets, du développement de la biodiversité, de la réduction de la consommation d'air conditionné, de l'aménagement de plans d'eau ou encore de la création d'espace vert (équivalant à 20% de la surface de la ville).
Pour illustrer sa proposition, la commission cite l'exemple des Mountain View en Californie, des Hammerdy Sjöstat en Suède ou encore des Ecotowns anglaises et rappelle que le Premier Ministre britannique Gordon Brown souhaitait la construction dans les années à venir de cinq Ecotowns appelées à accueillir de 10.000 à 20.000 habitants. Près d'une quarantaine de collectivités territoriales se sont déjà portées candidates de sorte que le gouvernement britannique a décidé de porter le nombre de ces Ecotowns à dix.
La commission espère ainsi avoir autant de succès. Pour cela, elle conseille de définir une vision, un cahier des charges et un financement équilibré associant Etat, collectivités territoriales, Caisse des Dépôts et secteur privé. Elle préconise également que les sites soient sélectionnés à partir des candidatures des villes, des pôles de compétitivité et des sites universitaires d'excellence et que trois Ecopolis sur les 10 prévues soient créées dans des quartiers prioritaires. Mais selon la commission, trois engagements préalables devront être pris par l'Etat à l'égard des collectivités territoriales et de leurs habitants à savoir l'absence d'impact de ces opérations sur la fiscalité locale, la qualité et la densité les plus adaptées aux exigences environnementales et la création d'emplois.
Les propositions faites par la commission n'ont pas été accueillies favorablement par les associations de protection de l'environnement qui, concernant les Eco-villes, évoquent les risques d'accélération de l'étalement urbain au détriment de la nature et la construction d'infrastructures routières. Selon elles, il vaudrait mieux améliorer les villes déjà existantes.
Une proposition de la Commission Attali visant à libéraliser la grande distribution a elle aussi provoqué la colère des ONG qui y voient un moyen d'accentuer la pression sur les conditions de production du monde agricole. Le modèle agricole que nous défendons n'est pas compatible avec un système où on encourage les très grandes exploitations agricoles, a expliqué à l'AFP Arnaud Gossement de France Nature Environnement.
Mais la proposition qui a provoqué le plus de remous est celle moins officielle du président de la commission Jacques Attali qui, à travers une lettre, demande au Président de la République de reconsidérer la question du « principe de précaution » inscrit dans la constitution française. L'article 5 de la Charte de l'environnement stipule en effet que « lorsque la réalisation d'un dommage (...) pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution (...) à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ». Or, selon le journal Le Figaro, les membres de la commission Attali y voient un frein majeur à la croissance. La commission souhaite surtout mieux définir et encadrer ce principe qui, de son point de vue, laisse beaucoup trop de place aux incertitudes.
Cette demande a provoqué déception et indignation du côté du Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables (MEDAD). Nathalie Kosciusko-Morizet secrétaire d'État à l'Écologie et ex-rapporteur de la charte de l'environnement, a évoqué dans Le Monde, un certain conservatisme : j'avais déjà eu, lors de la discussion sur la Charte de l'environnement, de tels débats avec une frange, qui traverse d'ailleurs tout l'échiquier politique, qui a une dimension réactionnaire, a-t-elle expliqué. Le ministre d'Etat, Jean-Louis Borloo, s'est également fermement opposé lundi sur France-Inter à la suppression du principe de précaution. Le ministre a toutefois précisé qu'il ne s'agissait pas des recommandations définitives de la commission Attali et qu'il attendait de voir le rapport définitif attendu pour décembre prochain.
La commission a d'ailleurs souligné qu'elle compléterait ses mesures dans le projet d'ensemble et qu'elle se réservait le droit de revenir sur ces sujets dans son rapport final.